LE CADRE JURIDIQUE DES CONDITIONS GENERALES EN DROIT DES CONTRATS FRANÇAIS ET ALLEMAND

PLAN

 

1/ INTRODUCTION  

2/ LE CADRE JURIDIQUE DES CONDITIONS GENERALES EN DROIT DES CONTRATS FRANÇAIS

2.1 Aperçu historique sur la notion des conditions générales

2.2 Les apports de la réforme du Code Civil français de 2016

3/ LE CADRE JURIDIQUE DES CONDITIONS GENERALES EN DROIT DES CONTRATS ALLEMAND

3.1 Dispositions légales du Code Civil BGB

3.2 Aperçu pratique

4/ APPROCHE COMPARATIVE

5/ REMARQUES

 

 

1/ Introduction

Avec l’impératif d’accélération et de rapidité indispensable dans la plupart des transactions, l’uniformité des modalités d’échange s’avère d’une nécessité économique évidente. Cette dernière donnera naissance aux contrats standardisés (types), à savoir aux conditions générales prédéterminées.

De ce fait, nombreux sont les contrats qui sont conclus sans être discutés et ce en fonction de conditions générales associées à une particularisation des conditions à travers des clauses particulières.

En effet, dans un rapport entre professionnels et consommateurs tout comme dans un cadre purement professionnel (B to B) les conditions générales sont rédigées ainsi que communiquées entre les parties du contrat afin de déterminer l’ensemble des règles qui régissent les relations contractuelles incorporées dans ledit Contrat d’où relève son caractère important qui mérite d’être étudié.

2/ Le cadre juridique des conditions générales en droit des contrats français

Pour cerner plus pertinemment les Conditions Générales, il convenait d’identifier son fondement historique dans un premier lieu avant de passer à son régime juridique actuel.

2.1 Aperçu historique sur la notion des conditions générales

L’introduction de la catégorie des Contrats Standards avec des conditions générales prédéterminés illustrées dans le Contrat d’adhésion dans le Code Civil français s’inscrit dans un mouvement de prolifération des contrats suite à la révolution industrielle, puis la révolution du numérique.

Les textes spéciaux et la jurisprudence fondée sur le droit commun étaient le moyen utilisé pour   protéger la partie la plus faible au contrat.

En effet, avant la réforme de 2016, les clauses abusives relevaient exclusivement des législations spéciales :

  • Les clauses réputées abusives pouvaient être écartées de certains contrats mais uniquement lorsque ceux-ci étaient conclus entre professionnels et consommateurs.
  • L’existence d’une clause abusive dans un contrat entre professionnels était uniquement susceptible d’engager la responsabilité de l’auteur de la clause vis à vis de son cocontractant sans que cette clause ne soit supprimée du contrat.

La réforme issue de l’ordonnance du 10 février 2016 vise à mieux répondre à la problématique des contrats structurellement déséquilibrés. Désormais, c’est dans le droit commun que le régime du contrat d’adhésion s’inscrit.

2.2 Les apports de la réforme du code civil français de 2016

Le Code Civil n’avait pas connu de réforme profonde en matière de droit des obligations depuis son élaboration sous l’empire Napoléonien.

Entre temps, Une jurisprudence abondante s’est développée afin de combler les vides juridiques liés aux fluctuations du contexte socio-économique continues.

D’une part et sur certains aspects, la réforme de 2016 n’a fait que codifier une jurisprudence déjà bien établie. Sur d’autres cependant, il s’agit de véritables innovations qui auront un impact important sur les pratiques commerciales. L’une des mesures les plus importantes de la réforme consiste à intégrer un contrôle des clauses abusives dans le droit commun des contrats.

L’Ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats introduit la notion de contrat d’adhésion dans le Code civil. La notion issue de ce texte est assemblée à un régime spécifique destiné à permettre une protection des adhérents, qu’ils soient consommateur ou professionnel. Cette protection est consacrée par la possibilité pour le juge de réputer nulles les clauses abusives contenues dans de tels contrats. En d’autres termes, peu importe que le cocontractant soit un professionnel ou un consommateur une clause pourra être supprimée du contrat si elle est considérée par le juge comme étant abusive ou créant un déséquilibre significatif entre les parties (Article 1171 nouveau du Code Civil).

Cette faculté ne s’appliquera qu’aux contrats conclus à compter du 1er octobre 2016.

Avant la réforme de 2016, la notion de déséquilibre significatif n’existait que dans deux textes spécifiques à savoir le Code de la consommation qui répute dans son article L 132- 1 non écrites,  les clauses abusives des contrats conclus entre professionnels et consommateurs  et le Code de commerce qui sanctionne, sur le terrain de la responsabilité, les clauses créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties à un contrat conclu par un producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers avec un partenaire commercial et ce au sein de l’article L 442-6, I-2.

Le nouvel article 1171 introduit le déséquilibre significatif dans le droit commun du contrat.

Seuls les contrats d’adhésion (dont les conditions générales, soustraites à la négociation, sont déterminées à l’avance par l’une des parties) sont concernés par cette nouvelle mesure par opposition au contrat de gré à gré (contrat dont les stipulations sont librement négociées entre les parties).

L’appréciation du déséquilibre significatif s’achève en tenant compte de l’économie générale du contrat et non clause par clause et ne doit pas porter sur l’objet principal du contrat (Art. 1171, al. 2) . De plus elle ne peut pas porter sur l’adéquation du prix à la prestation (Art. 1171, al. 2).

La clause engendrant le déséquilibre significatif est réputée non écrite. Elle n’est donc pas opposable au cocontractant victime du déséquilibre.

Cette sanction est particulièrement lourde : l’effacement de la clause est sans incidence sur les autres stipulations du contrat qui demeurent applicables en l’état, sans pouvoir être modifiées par le juge.

3/ Le cadre juridique des conditions générales en droit des contrats allemande

A la différence de la France, l’Allemagne a consacré aux conditions générales illustrées par des clauses d’un contrat-type qui ne sont pas négociables une réglementation spécifique.

3.1 Les dispositions légales du code civil BGB

L’ensemble Les règles antérieurement contenues dans la loi du 9 décembre 1976 (Gesetz zur Regelung des Rechts der allgemeinen Geschäftsbedingungen : AGB-Gesetz) sont depuis 2002 intégrées dans le Code Civil Allemand (BGB, articles 305 à 310), consolidant ainsi les dispositions générales du droit civil allemand portant sur la conclusion des contrats.

Elles ont pour but non seulement de protéger le consommateur d’un abus de pouvoir économique de son contractant, mais également de préserver l’équilibre contractuel dans les relations entre professionnels.

D’après l’article 305 I BGB, sont des conditions générales : “Toutes les conditions contractuelles qui sont formulées par avance pour une multitude de contrats, que l’une des parties pose à l’autre lors de la conclusion du contrat”.

D’après cet article, la loi sur les conditions générales ne s’applique pas aux accords individuels, dont les clauses ont été négociées individuellement entre les parties.

Les dispositions s’appliquent en intégralité dans les rapports entre commerçants et consommateurs. Par contre, pour les contrats conclus dans le cadre de leur activité, les commerçants, les personnes morales et les établissements publics ne sont pas soumis aux exigences légales sur l’incorporation illustrées dans les articles 305 II, III BGB et aux articles 308 et 309 BGB qui interdisent certaines clauses ; le seul critère de contrôle de la validité des conditions est l’équité (article 307 BGB).

Pour les professionnels, il faut en plus prendre en compte les usages commerciaux.

S’agissant de l’incorporation des conditions générales au contrat, il est essentiel que les conditions soient valablement intégrées afin qu’elles puissent étendre tous leurs effets.

Pour les contrats passés entre commerçants la pratique d’inclusion est simplifiée si les accords ont été passés dans le cadre de son activité commerciale.

Il suffit que celui qui veut incorporer ses conditions générales dans le contrat y renvoie de façon suffisamment claire soit par une mention expresse, soit par un comportement tacite non équivoque.

Si les deux contractants maintiennent des relations commerciales suivies, la mention des conditions générales dans le passé vaudra pour les contrats conclus par la suite. Les parties n’auront donc plus à confirmer à chaque nouvel accord l’insertion des conditions. On parle alors d’accord-cadre » (Rahmenvereinbarung).

S’il existe par ailleurs des conditions générales d’affaires courantes dans la branche, elles s’intègrent au contrat, même sans accord concernant leur insertion dans le contrat et même sans que le contractant en ait eu connaissance.

Les conditions générales doivent être claires et lisibles et formulées dans une langue comprise par l’autre partie.

De façon générale, le client accepte des conditions générales, soit expressément, soit tacitement, sachant que le silence est assimilé à une acceptation tacite.

Cependant, il arrive que les cocontractants fassent tous deux références à leurs propres conditions générales, mais qu’elles se contredisent. Dans ce cas, La jurisprudence applique la solution du “dissentiment ouvert” conformément à l’article 154 I BGB.

Ainsi, le contrat sera maintenu, mais sans appliquer la clause litigieuse. Elle sera remplacée par les dispositions générales du BGB.

Au sujet de l’Incorporation des clauses générales dans un contrat avec un consommateur trois conditions doivent être réunies :

  • Le stipulant doit renvoyer expressément ou par affichage aux conditions générales, au plus tard au moment de la conclusion du contrat.
  • Le consommateur doit pouvoir connaître le contenu des conditions et il revient au stipulant de les lui transmettre soit par remise directe soit par publication dans le catalogue de commande et les conditions doivent être lisibles et compréhensibles.
  • Il faut un accord exprès du consommateur lors de la conclusion du contrat et pour toute modification ultérieure.

Le contenu des conditions générales d’affaires est aussi d’une importance évidente, dans ce contexte l’article 307 BGB prévoit que les dispositions des conditions générales d’affaires sont nulles si le cocontractant du stipulant a subi un préjudice important, parce qu’elles violaient le principe de bonne foi.

Pour apprécier le préjudice, les juges tiennent compte de l’ensemble du contenu du contrat, de la particularité des relations professionnelles et de leur fréquence et surtout soupèsent les intérêts en jeu pour chacune des parties.

Dans le doute, un tel préjudice est présumé :

  • Si une clause porte atteinte de manière essentielle à l’une des dispositions légales ;
  • Si une clause limite les droits et les obligations issus par nature du contrat de manière que l’objet même ne peut plus être atteint.

L’article 305c BGB déclare illicite toute clause qui est insolite par rapport à l’ensemble du contrat et que le cocontractant ne doit pas s’y attendre.

D’après l’article 307 I 2 BGB un préjudice peut aussi résulter du fait qu’une clause ne soit pas claire et compréhensible.

Au cas où le contrat est conclu entre un commerçant et un consommateur, il faut, sous l’aspect du préjudice, aussi prendre en compte les circonstances de sa conclusion (Articles 310 III N3 BGB).

Pour les commerçants, l’article 307 BGB est capital, car c’est essentiellement la violation de la bonne foi qui sert de fondement à l’annulation des clauses inéquitables, sauf si elles sont justifiées par des usages commerciaux. L’article 310 I BGB exclut par ailleurs l’application entre commerçants des articles 308 et 309 BGB, contenant une énumération des clauses interdites ou annulables dans les conditions générales et s’appliquant d’abord au consommateur final.

C’est en appliquant les dispositions de l’article 307 BGB que les tribunaux en font tout de même une application similaire.

3.2 Aperçu pratique

La portée de ces clauses pour le cocontractant et leur équité ne peuvent s’apprécier qu’en tenant compte des circonstances de chaque espèce.

Parmi ces clauses, nous illustrons à titre d’exemple celles qui ont fait couler le plus d’encre en jurisprudence et en doctrine :

  • Le cas de l’application de l’article 308 N° 3 BGB sur le droit de résiliation du contrat

“La clause selon laquelle le stipulant peut résilier arbitrairement le contrat est nulle”.

En effet, une rupture unilatérale du contrat n’est possible que si le stipulant se base sur une des causes objectivement justifiées ou expressément prévues dans le contrat, comme par exemple le non-paiement d’une traite par le cocontractant.

Par contre, la maladie ou la désorganisation de l’entreprise ne peut pas être un motif légitime de résiliation, de même la simple possibilité temporaire d’exécuter.

S’agissant du rapport entre professionnels, de telles clauses sont appréciées plus libéralement.

  • Le cas de l’application de l’article 308 N° 4 BGB sur le droit de modification

Est nulle la clause selon laquelle le stipulant s’accorde le droit de modifier la prestation convenue ou de s’en écarter dans son seul intérêt et sans égard du cocontractant”.

La modification peut porter sur les matériaux utilisés, le modèle, la structure, la couleur ou le poids de la chose. Et elle sera d’autant plus illicite qu’elle entraîne une détérioration de la qualité de la chose.

Cette disposition est applicable entre professionnels sous l’ombre de l’article 307 BGB sur la bonne foi, mais il existe certaines flexibilités dans les affaires en ce qui concerne la qualité et le volume des produits livrés.

  • Le cas de l’application de l’article 309 N° 5 BGB sur l’évaluation des dommages-intérêts

“Est nulle la clause par laquelle le stipulant réclame des dommages-intérêts ou une compensation pour la dépréciation de la chose dont le montant forfaitairement fixé serait trop élevé par rapport aux dommages prévisibles ou à la perte normale de valeur”.

La même règle s’applique à travers le principe de bonne foi de l’article 307 BGB entre professionnels.

  • Le cas de l’application de l’article 309 N° 8a BGB sur le retard et impossibilité

Le stipulant ne peut pas interdire ou limiter le droit de son cocontractant de résoudre le contrat quand par sa faute il s’est mis dans l’impossibilité de livrer la chose ou qu’il la livre en retard.

Le même fondement s’applique partiellement à travers l’article 307 BGB pour les professionnels

  • Le cas de l’application de l’article 309 N° 8b BGB sur la garantie

L’article prévoit un certain nombre d’interdictions applicables pour tous les contrats de vente de marchandises neuves (les marchandises d’occasion n’étant pas soumises à cette réglementation, selon une jurisprudence constante) et de louage de services.

Pour évincer la responsabilité et appel d’un tiers en garantie, le stipulant ne peut pas se décharger entièrement ou partiellement de sa responsabilité pour vices ou les mettre sur des tiers. Subséquemment, la responsabilité du détaillant peut être engagée directement et non plus seulement celle du grossiste ou du producteur.

D’autre part, le stipulant ne peut pas limiter sa responsabilité à la mise en conformité ou au remplacement de la chose. S’il est insatisfait, le cocontractant doit toujours pouvoir demander la diminution du prix ou la résiliation du contrat.

Une telle clause limitative devra donc toujours prévoir le droit pour le client de demander la résiliation du contrat en cas d’inefficacité de la réparation (Fehlschlagen) sous peine de nullité.

Ces dispositions jouent à travers l’article 307 BGB entre professionnels.

Le vendeur doit supporter les charges résultant de la réparation, notamment les frais de transport et d’expédition, de travail et de matériel.

Le stipulant ne peut donc ni exclure ni limiter son obligation en reportant les coûts sur le client.

Le même principe s’applique entre commerçants.

4/ Approche comparative

Les entreprises françaises traitant avec des entreprises allemandes ne devront pas se contenter de traduire éventuellement leurs conditions générales sans faire vérifier leur compatibilité avec le droit allemand. Ce dernier connaît déjà certaines mesures retenues par le projet de réforme français.

En effet, le droit allemand a connu une Réforme importante du droit des obligations en 2002. Celle-ci était moins profonde que la réforme prévue par le législateur français.

Le traitement en droit allemand de certains aspects de la réforme française du droit des contrats, en matière de conditions générales commence par traiter la notion de déséquilibre significatif qui est certainement celle qui est la plus problématique aussi bien quant aux dispositions proposées par le projet de réforme du droit des contrats français, qu’au point de vue allemand. Cette ambiguïté trouve son fondement dans deux raisons : d’une part, elle s’ajoute à d’autres dispositions en droit français relatives au déséquilibre significatif ; d’autre part, le développement de la jurisprudence allemande relative aux contrats d’adhésion a montré que des dispositions très générales peuvent être interprétées de façon extensive par la jurisprudence.

Le sujet du déséquilibre significatif fait l’objet de deux règles en droit allemand : une disposition générale interdisant les contrats contraires aux bonnes mœurs (Article 138 BGB) et le contrôle des contrats d’adhésion ou des clauses non négociées (Article 305 s. BGB).

S’agissant des Contrat contraire aux « bonnes mœurs », tout acte juridique qui « contrevient aux bonnes mœurs », est nul. De même, est nul tout acte juridique par lequel quelqu’un, en utilisant la contrainte, l’inexpérience, l’état de nécessité ou la faiblesse de volonté d’autrui, se fait, à lui-même ou à un tiers, promettre ou garantir un avantage pécuniaire contre une prestation, en déséquilibre flagrant avec la prestation.

Ce texte sanctionne aussi bien la violence économique et l’usure que le déséquilibre significatif.

Ainsi, une différence entre la valeur de la chose et le prix convenu peut être sanctionnée si le vendeur avait l’intention d’abuser de sa position. Cette intention peut être déduite de certaines circonstances, présomption à renverser par le vendeur.

Pour la sanction de contrats d’adhésion créant un « inconvénient inadéquat », une base légale se trouve en droit allemand, dans une certaine mesure, grâce au contrôle des contrats d’adhésion.

Selon une disposition générale du BGB (section relative aux conditions générales de contrat et aux contrats d’adhésion), un contrat pré-formulé peut être nul même dans les relations entre entreprises si elle constitue un « inconvénient inadéquat » (« unangemessen benachteiligen») pour l’autre partie.

Cette disposition générale est appliquée de manière extrêmement extensive par la Cour suprême allemande (le BGH), aussi bien en ce qu’elle retient une définition très large de ce qui est un contrat d’adhésion, que par rapport à l’interprétation de la notion « d’inconvénient inadéquat ». Le BGH interdit par cette voie certaines clauses dans les contrats avec des consommateurs ou entre entreprises.

5/ Remarques

Dans le contexte de l’usage des conditions générales, plusieurs situations sont susceptibles de prêter à discussion. Ainsi, par exemple, qu’adviendra-t-il de la qualification du contrat proposé à la négociation mais qui n’a pas été retouché par le cocontractant destinataire de l’acte ?

Dans ce cas, la difficulté ne proviendra pas du droit à appliquer : dans cette hypothèse, en effet, les conditions générales du contrat ne sont pas soustraites à la négociation puisqu’en définitive le cocontractant n’a simplement pas usé de son pouvoir de négocier, ce qui est tout de même très différent.

La difficulté réside pour le rédacteur de l’acte de prouver que la négociation a pu avoir lieu alors que l’acte n’aura pas été retouché.

De même, le destinataire de l’acte aurait du mal à prouver que la négociation n’a pu avoir lieu s’il ne démontre l’existence d’aucun refus formel à la négociation.

On le pressent, dans un certain nombre de cas, le juge ne pourra déterminer si la négociation a pu (ou non) avoir lieu, autrement dit, si les « conditions générales » ont été « soustraites à la négociation ». De là, qui du rédacteur ou du destinataire de l’acte supportera la charge de preuve.

Afin d’éviter la sanction de la nullité de la clause, les parties aux contrats (et les rédacteurs) auront donc intérêt à conserver les preuves des négociations ayant pu entourer la conclusion du contrat et à retracer dans ce contrat l’historique desdites négociations tout en précisant que ces clauses ont été discutées puis acceptées par les parties en considération des obligations réciproques souscrites dans l’ensemble du contrat.

Le caractère abusif et la qualification de contrat d’adhésion sont deux conditions cumulatives du recours à l’article 1171 de la reforme française de 2016 sous laquelle le juge ne dispose du pouvoir de réputer la clause non écrite, que lorsque cette clause n’a pas été négociée. Selon un principe similaire, la réforme limite le pouvoir du juge aux clauses abusives des contrats d’adhésion, qui, par définition, ne sont pas négociés.

Cependant qu’en est-il lorsque le contrat d’adhésion comporte quelques clauses qui ont pu être négociées, et que ce sont ces clauses qui, précisément, sont abusives.

Dès lors que le contrat est qualifié « d’adhésion », toute clause de ce contrat semble pouvoir être réputée non écrite par le juge, sur le fondement de l’article 1171 du nouveau code civil. Il paraît toutefois que la question pourra donner lieu à interprétation par la jurisprudence.

S’agissant des sanctions, le nouvel article 1171 du Code Civil prévoit que la clause créant un déséquilibre significatif entre les parties est réputée non écrite

Les conséquences sont donc les suivantes :

– la sanction n’est pas la nullité du contrat, celui-ci étant donc maintenu,

– le Juge n’a pas la possibilité de rééquilibrer la clause litigieuse : celle-ci est purement et simplement annulée.

Ces conséquences sont lourdes puisque le contrat pourra donc subsister alors même que la clause réputée non écrite était peut-être essentielle à l’économie générale du contrat.

Afin d’éviter la disparition d’une clause que les parties jugent indispensable à l’économie du contrat, il pourra être convenable d’intégrer une clause prévoyant la nullité de l’ensemble du contrat en cas de suppression d’une seule clause, chacune desdites clauses étant considérée comme essentielle pour les parties et cela dépendra naturellement de la clause litigieuse et de l’importance qu’elle revêt pour les parties.

Un grand merci à ma collègue Meriem Rezgui du bureau CARNEADES Braunschweig!